Lorsque des époux optent pour le régime de la séparation de biens, cela implique qu’ils souscrivent un contrat de mariage.
Ce contrat de mariage est soumis à diverses règles qui définiront le statut pécuniaire des époux.
Le contrat de mariage peut contenir toutes sortes de clauses, sous réserve de certaines restrictions.
Le contrat de mariage inclut généralement une clause de présomption de règlement des charges du mariage qui interdit aux époux de prouver que l’un d’eux ne se serait pas acquitté de son obligation.
Le divorce entre époux mariés sous le régime de la séparation de biens est parfois source de difficultés lors du règlement de leurs intérêts patrimoniaux notamment, lorsque des sommes ont été versées par l’un d’eux au profit du ménage durant la vie commune.
Il s’agit là d’un contentieux récurrent pour lequel la Cour de Cassation apporte, depuis 2019, des distinctions en fonction des sommes en litige.
C’est ce qu’illustre un arrêt rendu le 17 mars 2021 (Cour de cassation, Chambre civile 1ère n° 19-21.463).
Dans le cas d’espèce, un jugement a prononcé le divorce de Mr V et Mme T mariés sous le régime de la séparation de biens.
Des difficultés sont nées lors du règlement de leurs intérêts patrimoniaux.
L’épouse a fait valoir en justice qu’elle avait une créance au titre de l’acquisition du logement de la famille du fait de l’apport en capital personnel (105 200,18 €) qu’elle avait effectué, étant précisé qu’en plus de cet apport, les époux avaient souscrit un prêt dont ils avaient tous deux réglé les mensualités.
Mr V s’opposait à cette demande, en faisant valoir que les apports réalisés par Mme T pour financer le terrain et le coût des travaux de construction d’une villa participaient tant de sa participation aux charges communes lorsqu’ils vivaient en concubinage que de sa contribution aux charges du mariage lorsqu’ils étaient mariés.
La cour d’appel a débouté l’épouse de sa demande de créance contre son époux au motif :
« [...] les versements effectués par l’un des époux pendant le mariage tant pour régler le prix d’acquisition d'un bien immobilier constituant le domicile conjugal que pour rembourser les mensualités des emprunts immobiliers contractés pour en faire l’acquisition [...] participent de l’exécution de son obligation de contribution aux charges du mariage ».
L’épouse s’est alors pourvue en cassation.
La Cour de Cassation dans l’arrêt précité, procède à la distinction suivante :
- Elle a jugé que seul le remboursement par l’un des époux marié sous le régime de la séparation de biens des échéances d’emprunt, à l’exclusion d’un apport en capital personnel, destiné à financer l’acquisition en indivision de la résidence principale ou secondaire de la famille, est susceptible de participer de l’exécution de sa contribution aux charges de la vie commune ou du mariage ;
- Se fondant sur l’article 214 du code civil, la Cour énonce qu’il résulte de ce texte que, sauf convention contraire des époux, l’apport en capital de fonds personnels, effectué par un époux séparé de biens pour financer la part de son conjoint lors de l’acquisition d’un bien indivis affecté à l’usage familial, ne participe pas de l’exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage.
Pour la Cour de Cassation, seul le remboursement des échéances d’un prêt était susceptible d’être considéré comme une contribution aux charges du mariage.
En revanche, l’apport en capital de fonds personnels par un époux, ne relève pas de l’exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage.
Ainsi, après avoir permis à un époux d’invoquer, en la prouvant, une surcontribution, aux charges du mariage venant en contradiction avec les clauses du contrat de mariage, la Cour de Cassation affine son raisonnement non plus à la seule hypothèse d’un financement par des revenus mais aussi à l’hypothèse d’un financement par un apport en capital de fonds personnel qui ouvre droit à revendication d’une créance.
Dorénavant, pour des époux mariés sous le régime de la séparation de biens, il conviendra, en cas de litige, de distinguer les modalités de financement du logement familial, la qualification juridique en résultant pourra être déterminante sur le règlement de leurs intérêts patrimoniaux.
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